Présentation
"La purulence des initiés français a atteint au paroxysme du spasme." (Artaud à Hitler)
Au milieu de la Seconde Guerre mondiale, Antonin Artaud est écarté du monde. En 1943, l’auteur du révolutionnaire Théâtre et son double est interné à l’asile de Rodez. Comédien, metteur en scène, théoricien, visionnaire, illuminé et migraineux, Artaud aura été le complice, le maître ou l’ennemi immédiat de Breton, Adamov, Vitrac, Balthus, René Clair, Autant Lara ou Abel Gance. Il aura bouleversé les arts des représentations d’un monde dont il incarne la chute, les manques, les folies. En 1943, depuis Rodez, il écrit à Hitler qu’il prétend avoir rencontré au Romanische Café dix ans plus tôt. "Je lève aujourd’hui, Hitler, les barrages que j’avais mis ! Les Parisiens ont besoin de gaz. Je suis vôtre." Le poète fou quitte l’asile en 1946, meurt en 1948. Soixante ans après ces quelques lignes adressées au chancelier du Reich, l’auteur Tom Peuckert s’empare de la voix d’Artaud, des mots du poète consumé par sa revendication d’art de chair et de sang, nécessaire absolument, pour inventer la confrontation du poète et du dictateur.
Prodige de la scène allemande, rockeur et metteur en scène, direct héritier de Bertolt Brecht, de Heiner Müller et autres maîtres de l’histoire du Théâtre, Martin Wuttke a succédé quelque temps aux directeurs sus-cités du Berliner Ensemble, bastion berlinois. Acteur impulsif, instinctif, animal, il a incarné les plus fortes créatures de la littérature dramatique sous la direction des plus grands artistes, dont Frank Castorf, Bob Wilson, Christoph Marthaler et dernièrement Quentin Tarentino, dans Inglorious Bastards. Paul Plamper dirige aujourd’hui Martin Wuttke, incarnant Artaud qui se souvient d’Hitler. Il met en scène le cri solitaire d’un démiurge fou aux gestes déraisonnables, dont l’exigence fut de réinventer un théâtre essentiel au monde, un théâtre qui remettrait les êtres face à leur besoin impérieux de sacrifice et de grandeur.
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