Présentation
Fini, c’est fini, ça va finir, ça va peut-être finir.
Clodos célestes ou fées embourbées, dix corps aux visages blafards dansent. Ils racontent la drôlerie de l’impossibilité d’être ensemble. Ils se meuvent dans l’incapacité tragique à rester seul. Le quotidien, sublimé, fait se heurter des corps abîmés dans le clair-obscur étrange d’une vie qui tient et persiste avant la fin. Dix humains en bande, en meute, se heurtent, circulent, se cognent. Quelques mots seulement, gueulés, chantés : "Fini, c’est fini. Ça va finir, ça va peut-être finir." Les fantoches plâtreux plongent dans l’absurdité abyssale de la comédie de la vie. Les dix clowns enfarinés forment une masse mouvante, assemblée grimaçante et loqueteuse. Ils errent, en rythme, ils tanguent, avancent par chocs ou ralentis. Sous les conseils et le regard de Beckett qu’elle rencontrait en 1980, la chorégraphe a dirigé un magma de figures d’humanité absolue. Ils n’ont fait vœu que d’"être là, sans l’avoir décidé, entre ce moment où l’on naît, où l’on meurt".
Début des années quatre-vingts, Maguy Marin lit Fin de Partie, Molloy, En attendant Godot. Bouleversée, elle reconnaît dans les œuvres complètes de Beckett l’exploration des mouvements empêchés mais nécessaires. Toutes aspirations humaines, rien qu’humaines : tenir encore. Elle guette et veut mettre en scène "ce moment qui nous met dans l’obligation de trouver une entente quelconque avec plusieurs autres, en attendant de mourir". Création en 1981. Réactions hostiles d’abord. Et peu à peu, l’ascension. Reconnaissance mondiale de l’atemporel May B, chef-d’œuvre de la danse contemporaine. En trente ans, les reprises incessantes sur les cinq continents ont inscrit l’œuvre comme un joyau du répertoire. May B, "peut-être", bouleverse encore les codes en vigueur, réconcilie théâtre et danse, marque l’histoire des arts vivants par la grâce d’un spectacle essentiel, mythique.
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