Présentation
Une lettre au père de cinquante pages. Pas un règlement de compte, mais le constat amer d’un fils étouffé dont la vie entière aura été hantée par les sentences paternelles. Ce texte, extrêmement poignant, est comme un cri de survie. Le metteur en scène, Jean-Yves Ruf, familier des blessures de l’âme, le confie à Jean-Quentin Châtelain, l’un des acteurs les plus habités qui soit. Entre rage et tendresse, seul, l’acteur devient le porte-parole de la douleur de tous les fils.
Kafka a 36 ans. Quelques années avant sa mort, alors qu'il projette de se marier avec Julie Wohryzeck, il rédige une longue lettre à son père : elle ne parviendra jamais à son destinataire. Entre colère et amour, cette déclaration de guerre autant qu'une volonté d’apaisement, dit la douleur d’un fils qui clame son droit d’exister à un père envahissant. Les mots claquent, précis, furieux. Plus le fils fait l’éloge du père, plus résonnent en creux la rage de l’enfant dominé. Comment hurler ses terreurs enfantines et rêver une autre relation. Kafka, rongé par la culpabilité, tangue. Sans doute sait-il que ces cinquante pages ne pourront jamais rien résoudre. Mais a-t-il un autre choix quand sa survie est engagée ? Il s’agit pour lui de lui trouver une langue qui résoudrait l’équation intérieure d’un enfant blessé, devenu adulte, sur le point de se marier, voire de devenir lui-même père.
Jean-Yves Ruf a choisi de ne rien opposer à ce texte magnifique. L’espace est totalement habité par l’acteur, qui arpente le plateau nu, entre trois bancs et quelques traits de lumière. Avec sa diction si particulière, Jean-Quentin Châtelain sait laisser les mots en suspens quand plus rien ne peut se dire. Sans cesse "à tutoyer les gouffres", il est à la fois le père et le fils réunis, donnant au texte, que tous ceux qui l’ont lu se sont approprié, une distance mordante, ironique, parfois légère, souvent furieuse. Et surtout, il sait tendre un fil de plomb entre le père et le fils pour exprimer le désespoir d’une relation terrifiante.
Pour le tarif réduit, un justificatif sera demandé au théâtre lors du retrait des places
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